Posté le Lundi 30 septembre 2019
Marina Rebeka et Karine Deshayes triomphent et enflamment le Capitole de Toulouse dans une nouvelle production de Norma de Vincenzo Bellini, mise en scène par Anne Delbée. Pour ces deux cantatrices, ce fut un délire du public au moment du salut final.
Marina Rebecca a cet aplomb dans la voix. Elle tient ce rôle du début à la fin de l’ouvrage avec une ligne de chant belcantiste, allant du grave bien posé aux aigus percutants, tout en gardant cette fraicheur de timbre. Elle est à la fois par son jeu et sa voix, la vengeresse déterminée, la mère coupable et surtout l’amoureuse cachée. Sa confidente Karine Deshayes est Adalgisa. Elle a ce « je ne sais quoi » qui nous fait chavirer par son grain de voix, son velouté, sa puissance dans les aigus et ces phrasés dans les graves qui malgré un peu de perte de noirceur, nous envoutent. La communion de ces deux voix féminines est magique. Dans leurs duos, elles sont toujours reconnaissables dans les moindres détails. Du grand art.
Chez les hommes, nous restons un peu sur notre faim. Pollione en la personne de Airam Hernandez démarre au premier acte sur les chapeaux de roues, avec une puissance de voix, ensoleillée et très bien projetée. Les passages dans les tonalités plus aigues semblent rester un peu en arrière. La fatigue peut être. Prévu dans le second casting il a dû assurer toute la série. Ses quelques difficultés semblent passagères. C’est un grand ténor comme on les aime, généreux.
Tous les seconds rôles, par contre, semblent assez faibles et très en retrait physiquement et surtout vocalement.
Les chœurs du Capitole toujours au top de leur talent. C’est toujours une émotion de les écouter. L’Orchestre national du Capitole n’a fait qu’une bouchée de cette partition, grâce à la baguette subtile et magique tenue par le maestro Giampolo Bisanti.
Reste la mise en scène de Anne Delbée. Elle connait très bien l’histoire et toutes les légendes qui sont rapportées à cette période historique entre les gaulois et les romains. Cependant par moment il n’y a qu’elle qui s’y retrouve, car entre les surtitrages, et les symboles traditionnels disparus – les époux ne se jettent pas dans les flammes, il n’y a pas de gui, de gongs, d’armes, de morts… – et tous ceux qu’elle a rajoutés – on finit par s’y perdre. Est-ce grave ? Je ne pense pas. La musique parle d’elle même. Par contre, avoir ajouté des textes parlés, diffusés par hauts parleurs pendant l’ouverture musicale de l’œuvre et au cours du spectacle, je dis stop ! Si je vais à l’opéra c’est pour entendre de la musique, ce n’est pour écouter des textes, non voulu par l’auteur, masquant la musique. De plus ces textes étaient très mal dits comme si à Toulouse il n’y avait pas de comédien sachant articuler avec un timbre intéressant. On ne comprenait rien du tout. Il est curieux qu’un metteur prenne la liberté de nous priver de musique pour laisser la place à des textes parlés. C’est une trahison.
Jean-Claude Meymerit le 29 septembre 2019
PS : pendant tout le premier acte et dans d’autres scènes du spectacle, des projecteurs, dont un blanc super puissant, installés dans les cintres se reflétaient sur le praticable de scène en éblouissant le public placé dans les hauteurs. On ne pouvait pas distinguer les visages des protagonistes.