Je devais faire un petit article officiel sur la plaque posée très haut sur la façade d’un grand immeuble bordelais, place Gambetta exactement. Cette plaque évoque la présence, pendant un certain laps de temps, de Philadelphe de Gerde poétesse occitane très connue à son époque. La plaque est tellement haute et usée qu’on ne peut pas distinguer les dates mentionnées et certains mots du texte. Me voilà donc à la recherche des renseignements manquants.
Ma première démarche fut d’abord d’aller à ce numéro là et de me renseigner auprès du commerçant du rez-de-chaussée. Très sympa il me répond qu’il n’en sait pas plus et nous voilà dans la rue pour déchiffrer à deux la plaque. Nenni, pas moyen de lire. Je me décide alors de téléphoner aux Archives municipales de Bordeaux. Choux blanc. Il fallait que je me déplace pour avoir l’info. Je contact mon réseau des Archives, re-choux blanc, les congés avaient sévi. Après avoir écumé tous les sites sur internet parlant de cette poétesse, feuilleté chez moi les moindres recoins de mes documents, un seule date revenait : sa naissance 1871 et sa mort 1952. Que me restait-il à faire ? Si j’allais chez mon libraire préféré et lire tous les bouquins sur Bordeaux. Impossible ! Je demande donc au vendeur le renseignement en question : à quelles dates cette poétesse a-t-elle habité dans cet immeuble ? À tout hasard, il me conseille de consulter un gros pavé de viographie de la Ville écrit par un célèbre historien bordelais. Pile poil, à la page place Gambetta, l’auteur stipule la présence d’une plaque sur l’immeuble et ce qu’il y a d’écrit dessus. J’étais sauvé et excité à la fois. J’avais sur une seule ligne toute l’info recherchée.
Peur de perdre les dates qui m’intéressaient sur la présence de la poétesse à Bordeaux, je demande au vendeur si je peux relever les dates sur mon carnet de notes. Plus que son accord, il me proposa de prendre une photo de la ligne. Tout content et prêt à sortir de la librairie je réalise que ce serait encore mieux que j’achète le livre (25€) pour être bien sûr de l’info. Avec ces trois précautions j’étais sûr d’avoir la bonne info. La fameuse phrase et date mentionnées dans le livre sont : “elle vécut de 1814 à 1826”. Une fois dans la rue je me dirige vers un rendez-vous dans une vieille bâtisse de 1580 dans un autre coin de Bordeaux. En cours de route, je me remémore les fameuses dates de Gambetta et réalise qu’il y a un lézard quelque part. Si cette poétesse est née en 1871 elle ne peut pas avoir habité l’immeuble en 1814. En vérité les bonnes dates sont 1914 à 1926. L’auteur du bouquin se serait gouré de cent ans sur les dates indiquées sur la plaque.
J’arrive à mon rendez-vous et montre mon nouvel achat de bouquin à mon interlocuteur locataire d’un immeuble du 16°. Il feuillette pour trouver le nom se sa rue et lit que l’on parle de son immeuble. Paf, il me dit : “l’auteur s’est gouré d’un siècle dans le livre” En effet, l’auteur parlait bien de cet immeuble mais stipule qu’il est du 17°. Je ne pouvais pas laisser ces deux coquilles sans revenir voir mon libraire. Cette anecdote nous à fait mourir de rire.
Quand je pense que j’ai acheté un gros livre rien que pour deux dates (fausses), que le second renseignement recherché est également faux, cela devient rocambolesque. Je n’ai pas vérifié d’autres infos. On verra au fil de l’utilisation de ce livre. Mais le pire est que je ne souviens pas où j’ai glaner les dates 1914 à 1926. D’ici que moi aussi je me sois gouré ! Au diable les siècles !