Quel parcours de combattant pour avoir une place ce dimanche 21 janvier à l’Auditorium de Bordeaux pour assister à la seconde et dernière représentation (pourquoi que 2), de Pelléas et Mélisande de Claude Debussy.
Avant même de l’avoir vu, on sentait déjà qu’il ne fallait pas rater un tel événement lyrique. L’affiche affichait un plateau de rêve.
Après l’avoir vu, on conseillerait même que c’est le spectacle qu’il est obligatoire de voir ou d’avoir vu une fois – ou plusieurs fois – dans sa vie. Tout y était réuni. Aussi, il est très difficile de savoir par qui ou par quoi commencer. La réussite en revient en tout premier à l’Orchestre national de Bordeaux Aquitaine avec à sa tête Marc Minkowski. Un fleuve de velours aux contours mordorés. Quelle magie d’équilibre entre ses musiciens tous placés sur scène et les chanteurs jouant et se déplaçant tout autour. C’est alors qu’opère la signature du metteur en scène Philippe Béziat lorsque les lumières de la salle s’éteignent et que le plateau avec en son centre l’orchestre entouré de praticables, de voilages noires et d’un immense fond noir de scène, sur lequel sont projetées des séquences vidéos.
Ce ne sont pas les vidéos en soi qui sont passionnantes – peut-être même un peu trop – , mais plus les espaces ou elles sont projetées. De plus, leur traitement en noir et blanc est fabuleux de classe. Des forêts, de l’eau, des regards, des grottes…des profondeurs de champ et du trompe l’œil à couper le souffle. Avoir utilisé un grande partie de la salle – aux dépends des spectateurs qui n’ont pas pu avoir de places - dans toute sa hauteur et largeur, est grandiose. Le metteur en scène Philippe Béziat connaissant parfaitement cet ouvrage – l’ayant traité au cinéma - a aussi une grande connaissance de l’espace et de l’esthétique. Ce fut pour moi, un très grand choc visuel.
Sa direction d’acteurs est aussi exceptionnelle. Tous bougent avec précision en exprimant en continu toutes leurs émotions, par leurs gestes, leurs postures et les expressions de leur visage. Les chanteurs sans exception sont les personnages. Que dire des voix ?
La sublime et mal reconnue des directeurs de théâtre, Sylvie Brunet-Grupposo, aborde à nouveau le rôle de Geneviève avec toute l’intelligence vocale (et quel timbre !). Jérôme Varnier reprend le rôle d’Akel qu’il aborde lui aussi sur de nombreuses scènes. Sa chaleureusement voix de basse toujours appréciée, est mise au service de ce personnage complexe et profond.
Les trois principaux rôles, sont des prises de rôles. Alexandre Duhamel apporte à Golaud toutes les facettes voulues par ce rôle avec une voix chaude et puissante au jeu précis et torturé. Un très expressif Golaud. Chiara Skerath est Mélisande à qui elle s’en remet toute entière. Dès son apparition, on devine qu’elle est déjà perdue aux deux sens du terme. Sa fragilité jusqu’au destin final nous émeut, grâce aussi à cette très belle voix à la fois légère et engagée aux tendres médium. Séduisante découverte. Reste le personnage de Pelléas. On ne remerciera jamais assez Stanislas de Barbeyrac d’avoir tenté ce rôle. Il est Pelléas par la voix, le physique, le jeu. Sa magnifique voix de ténor aux larges médiums nous enchante. Tout est beau. De plus c’est un fin comédien. Vivement que nous le revoyons dans ce rôle.
Si par hasard, Monsieur le Directeur de l’Opéra de Bordeaux, vous tombez sur ce modeste billet, pensez à Sylvie Brunet et à reprendre sans trop tarder ce fabuleux Pelléas.
Jean-Claude Meymerit
22 janvier 2018
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