Ravel à l’Auditorium de Bordeaux, une déferlante d’émotions pour son Boléro.

Posté le 2 décembre 2016

Du jamais vu ! Les spectateurs penchés en avant sur leur fauteuil, des larmes aux yeux chez certains, tous écoutaient avec leurs oreilles et leurs yeux ce célèbre Boléro de Maurice Ravel, super connu et popularisé. Pourquoi ce soir, une telle tétanisation chez le public ? Je pense que cela vient de deux phénomènes : le premier est l’ordre de passage d’interprétation des oeuvres et le second est la main à la fois de fer et de velours de Paul Daniel avec laquelle il dirige l’Orchestre national de Bordeaux-Aquitaine.

La soirée commence avec l’Heure espagnole du même Ravel interprétée par quelques joyeux drilles du lyrique français que nous aimons tous, je veux citer en particulier, Karine Deshayes, Yan Beuron, Paul Gay et Florian Sempey. Bien sûr qu’il manquait la mise en scène et tous ces claquements de portes de pendules, des  montées et descentes dans les escaliers etc. C’est tout de même une comédie musicale et comme toutes les comédies c’est surtout le visuel qui l’emporte. Dans la version de ce soir en version concert (hélas !), on ressent nettement ce manque surtout que les parties musicales vocales ne sont pas à tomber à la renverse. Nos chanteurs français ont prouvé une fois de plus qu’ils existaient et que les scènes françaises et internationales, pour le répertoire français, devraient se les arracher.

Suite à cette Heure espagnole, était inscrit Iberia de Claude Debussy. Dans cette œuvre orchestrale, on sent déjà pleinement la main mise de Paul Daniel sur cet immense Orchestre. Cet Orchestre national n’a rien à envier aux plus grands orchestres du monde mais au contraire ceux-ci devrait le copier. Les musiciens, pour la plupart assez jeunes, jouent avec fougue et autorité. Leur bonheur se voit et surtout s’entend.

Pour la dernière œuvre de la soirée, le Boléro de Ravel. Je me disais, « encore ce Boléro tellement joué et rejoué. Quoique quinze minutes c’est vite passé. » Paul Daniel, avec son jeune tambour à quelques centimètres de lui, lance la machine infernale (la honte pour la personne qui a toussé au même moment !).

La déferlante est partie, les instruments décollent ? Chaque musicien veut être le meilleur et donner son maximum. Ils n’existent plus que pour leur instrument et nous faire partager leur joie. Chaque sonorité entrant dans l’arène, s’arrache de leur instrument, racle le sol, les murs, nos yeux, nos oreilles comme pour nous arracher le cœur. Wouah ! Au rythme du Boléro, les poils de notre corps se hérissent, le cœur tape, les émotions montent. Sur scène, plus on avance dans l’oeuvre, plus, les corps des musiciens bougent un peu plus, les mains s’animent – je pense surtout aux doigts des cordes qui remplaçant leur archet forment un petit ballet – Je suis incapable de citer tous les instruments, leur nombre est impressionnant. L’ONBA au grand complet. Dans la salle les corps des auditeurs commencent à se pencher de plus en plus en avant, les souffles sont coupés, les larmes sont au niveau des yeux, puis sur l’apothéose finale du Boléro, l’ovation et les larmes coulent. Du jamais vu…et entendu !

Paul Daniel et tous les musiciens de ce fabuleux Orchestre, vous êtes des fabricants d’émotions collectives. Une véritable communion s’est établie ce soir dans l’Auditoruim de Bordeaux. C’est ça le génie des vrais Artistes !

Jean-Claude Meymerit

Nota : une petite anecdote à l’entrée de l’Auditorium : un monsieur attendait dans la file d’attente pour l’achat de places. Il demande à une dame, à quelle heure ouvre le guichet ? combien de temps dure le spectacle , y a t-il des bonnes places ? etc…Un grand moment de silence, puis il demande à la même dame : « qu’est ce qu’il y a comme spectacle ce soir ? ». réponse « du Ravel ». Voilà une chose expédiée !

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