Moi qui apprécie fortement ce genre de répertoire (comédie musicale, opérette, opéra bouffe), je m’étais fait une joie de découvrir cet ouvrage d’Hervé que je ne connaissais absolument pas. Seuls, les refrains de sa « Mademoiselle Nitouche » fredonnent dans ma tête.
Cette coproduction bordelaise des Chevaliers de la table ronde est montée à grands coups de communication, voire de marketing. En effet, tout est mis en place pour vendre ce spectacle comme un produit de consommation courante. L’enseigne/affiche annonce la couleur ou plutôt les deux couleurs, blanc et noir. D’emblée dans le hall d’entrée du Grand Théâtre le ton est donné avec des totems signalant la vente de l’enregistrement de cette œuvre. En effet, sur un immense comptoir, les CD attendent le client. Les programmes sont également au graphisme bicolore du spectacle. Tout ceci ne me dérange pas, bien au contraire, c’est classe et efficace. Nous sommes bien dans l’ère de la communication. On sent tout de suite que c’est une production de tournée avec tout son emballage commercial.
Dans la salle, le rideau de scène représente l’affiche du spectacle. Dès que celui ci s’ouvre, le décor et les costumes sont tous aux rayures et aux couleurs graphismes blanc et noir. Tout semble magnifiquement commencer.
Mais alors, qu’est-ce qui ne fonctionne pas dans cette production ?
Ce ne sont que ces cris, des hurlements, un débit du texte parlé incompréhensible, une excessive gesticulation permanente des artistes qui nuit à la compréhension du texte. Je n’en pouvais plus ! Une bouillie (pour un opéra bouffe, c’est normal !!!). Ce n’est pas parce qu’un ouvrage s’appelle opéra-bouffe qu’il faut en rajouter des tonnes en forçant outrancièrement sur la manière de parler et de gesticuler. C’est un contresens.
Tous ces artistes à la fois chanteurs, comédiens, danseurs ont beaucoup de talent et de qualité, mais ce n’est suffisant s’il n’y a pas la compréhension du texte. Les couplets chantés, eux, sont beaucoup mieux défendus.
Ce qui m’a fait le plus rire et que j’ai trouvé le plus ridicule, ce sont les surtitrages. A quoi servent-ils ? Une opérette parlée et chantée en français avec un surtitreur. Le comble de l’absurdité ! Ce ne sont pas eux qui vont aider les artistes à se perfectionner. Au contraire.
Le jeu scénique va tellement vite avec mille choses sur scène qu’on n’a pas le temps de lire et inversement le temps qu’on lise on ne voit pas ce qui se passe sur scène. Ne vaudrait-il pas mieux que les artistes apprennent à bien articuler et « porter leur diction » plutôt que d’installer des outils modernes inutiles et parasites ? Ne vaudrait-il pas mieux également que les metteurs en scène respectent un peu plus avant tout les chanteurs, en jouant sur leur faiblesse et leur qualité.
En applaudissant avec chaleur, je voulais me persuader. Me persuader de quoi ? Que ce genre de spectacle est fait plutôt pour des salles de jauge moyenne ? Pas forcément. Il y a quelques années, toutes ces formes lyriques légères et drôles avec beaucoup de passages parlés étaient défendues jusque dans le plus haut des cintres de la salle du Grand Théâtre, il n’y avait pas de surtitrage ridicule et on comprenait tout.
L’articulation, la projection de la voix et le respect des metteurs en scène pour les chanteurs (et pour le public) étaient une priorité incontournable. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Jean-Claude Meymerit