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Archive pour septembre 2011

Opéra de Bordeaux : deux Butterfly avec une seule aile

Décidément l’Opéra de Bordeaux adore ce jeu ambigu de deux distributions dites A et B. Comme je l’ai souvent mentionné cette classification perturbe l’esprit. Dans la plupart des têtes il est évident que le A est meilleur que le B. Dans la plupart des théâtres lyriques on parle d’alternance ou double distribution. Ainsi tous les artistes sont a égalité aux yeux du public. Sauf à Bordeaux ! Allez savoir !
J’ai bien sûr assisté aux représentations avec les deux distributions. Dans les deux, une direction d’orchestre de Julia Jones assez déroutante tout au moins au cours des premières représentations avec des ralentissements, du laisser aller avec les cuivres aux endroits ou une caresse musicale devrait intervenir laissant émerger les voix au lieu de les couvrir. Défauts que je n’ai plus retrouvé à l’avant dernière. Bien au contraire j’y ai entendu une lecture plus appliquée, précise, racontant presque l’histoire, un miracle !
Heureusement que des voix comme celle de la magnifique Alketa Cela en Madame Butterfly, et du très intelligent Pinkerton en la personne de Chad Shelton nous absorbent. Quel couple harmonieux et ceci sur toute la ligne. On croit en leur histoire et nous sommes émus. Je n’en dirais pas autant avec le couple Gilles Ragon et Cécile Perrin qui donnent à leurs personnages des allures guignolesques au lieu d’une simple lecture tragique puccinienne. Pour Gilles Ragon, quelle désolation son Pinkerton. Aucun sentiment, gesticulation inutile, aucune précision dans les gestes, notes tonitruantes à tout vent. A force de vouloir tout chanter, voilà ! Tant qu’à Cécile Perrin il semble qu’elle ait confondu tous les rôles de son répertoire. En tout cas elle n’est vraiment pas une Butterfly. Dommage, pour une prise de rôle !
Alors que pour la même prise de rôle, Alketa Cela chante, joue et émeut avec beauté et aisance. Dès les premières notes de son entrée, son timbre nous envahit et ne nous quitte pas. Nous savons ainsi que nous allons apprécier une vraie Butterfly ! Toute la soirée on est suspendu à ses lèvres. Elle est habitée par Puccini car elle aime Puccini cela se voit et s’entend. A quand sa Mimi à Bordeaux ? Chez son partenaire Chad Shelton, il suffit de l’entendre et de regarder son jeu et l’on comprend aussitôt les intentions psychologiques de Pinkerton. Même si la voix n’est pas d’une grande puissance « voyante », on l’écoute avec attention car tout chez lui est juste et tout nous invite à l’émotion. Tout le contraire d’un chanteur “beuglard”.
Si je fais l’impasse sur tous les autres rôles des deux distributions c’est que tous campent et interprètent parfaitement leurs personnages. Jusqu’aux plus petits, tous sont à leur place et chantent. On les écoute vraiment et on les applaudit.
En ce qui concerne la mise en scène de Numa Sadoul, du beau et du moins beau, des effets utiles et inutiles, du vu et déjà revu, en clair trop d’années sont passées depuis la première. Aussi, est-ce peut-être la faute à cette mise en scène si nos mouchoirs sont restés dans nos poches ?



Un parfait exemple de moutonnage !

Une fin d’après midi dans un tram bondé. A l’arrêt de la Place de la Victoire pour ceux qui connaissent. Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est une place qui ressemble à une fourmilière dérangée par la chute d’une feuille. Un monde fou sur le quai. La rame s’arrête, quelques rares personnes descendent et très peu peuvent monter. C’est alors que ce produit le miracle. Sur le quai, un homme d’une trentaine d’années déclare avec une voix ferme et autoritaire : « le tram reste à quai, tout le monde descend ». Bien sûr, personne ne proteste et râle mais pratiquement tout le monde descend de la rame. En ce qui me concerne, toujours dans la question du pourquoi ou de montrer toujours une certaine réticence aux ordres donnés sans explication, je ne descends pas. Ce monsieur n’avait pas à mes yeux le look l’autorisant à prendre une telle décision. Comme quoi les clichés fonctionnent bien. Avez-vous vu un employé de chez Kéolis en pull bariolé, jogging et sans badge donner de tels ordres ? Figé dans mes observations je ne bouge pas, les portes se ferment et le tram repart. La gueule des gens sur le quai ! Et nous dans la rame les éclats de rire. Pour notre homme, il avait réglé en quelques secondes les flux et reflux des bousculades aux heures d’affluence, en faisant descendre pratiquement tous les usagers. Très fort ! Tant qu’aux passagers, pauvres moutons !



Lire une revue en voyage : à chacun sa méthode !

A côté de moi dans le train, une dame attaque la lecture de son Point de Vue dès le démarrage du train. Page après page dans le détail.Toutes les légendes des images montrant dans toutes les postures, nos élus, nos rois, nos reines et nos peoples y passent. Jusqu’ici pourquoi pas. Je lis bien moi un magazine uniquement réservé à l’opéra que seuls deux marchands de journaux dans Bordeaux, vendent. Tout à coup la page, aidée par un doigt longuement mouillé, bascule à gauche et mon oeil tombe sur deux pages réservées à Arthur Rimbaud. A peine ai-je eu le temps de lire le mot Rimbaud qu’elle passe brutalement à la page suivante. Elle n’ai jamais revenu sur cette double page. Pourquoi ? J’avais presque envie de lui poser la question, mais de quoi je me serais mêlé ! Ainsi je ne saurais jamais pourquoi cette vieille dame n’a pas lu ces deux pages (ou tout au moins les légendes des photos) sur Rimbaud. Il est vrai qu’il ne devait pas y avoir écrit : « vu à la télé ».

Devant moi dans le train deux femmes de la trentaine lisent dans une revue spécialisée la programmation culturelle parisienne et tombe sur l’annonce d’un spectacle d’un musicien très cher au coeur d’une d’entre elles. Cette fan s’esclaffe : « comme toujours on n’est au courant de rien ! ». Pauvre musicien responsable de cette subite montée d’adrénaline. S’il avait su, il lui aurait envoyé un mail pour lui dire où il se produisait…

Dans l’avion à côté de moi : un couple cinquantenaire nouvellement constitué à en croire et à surtout voir leur comportement frôlant l’extase. Sur son épaule pendant que Monsieur lui lit et commente chaque ligne et chaque photo du Reader’s Digest, elle ne disait mot et avait fermé les yeux. L’écoutait-elle (ou pas) ? C’est beau l’amour béat ! Mais pour moi les synthèses de revues à la sauce « je t’aime dont ferme les yeux et écoute ! » trop peu pour m’assoupir.